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    "REVIVRE" A tous les anciens d'Avesnes-le-Sec

     

    De 1946 à 1954, dans ce vieux château du nord de la France, situé à mi-chemin entre Valenciennes et Cambrai, non loin d'Iwuy, à Avesnes-le-Sec, environ quatre-vingts enfants venus, de la région parisienne, de Bourgogne, de l'Isère ou du Nord (pardon pour ceux que j'aurais oublié), purent  grâce à un couple d'enseignants admirables, monsieur Jacques FONTAINE et madame Germaine FONTAINE-SOURMAISE, vivre et grandir dans un milieu familial, une une école de "plein-air"  créée par l'association pour orphelins de la Résistance, "REVIVRE".

    Monsieur et madame FONTAINE, restaurèrent en partie le château, avec leurs seuls bras et mettant souvent leurs parents à contribution. Leurs quatre enfants partagèrent notre vie. Leurs grands-parents étaient nos grands-parents, merci à eux de nous les avoir prêtés.

    J'ai vécu dans ce petit village du Cambrésis durant cinq années. D'octobre 1949 au mois de juin 1954. J'y ai fait tout ma scolarité primaire.

    Début octobre, à la rentrée scolaire, nous partions, le matin,  en bus depuis Paris, rue de la Faisanderie dans le 16e arrondissement. Nous nous arrêtions pour manger dans la forêt aux alentours de Péronne, pour arriver en fin d'après-midi à Avesnes. Nous retournions dans nos familles aux  vacances de Noël,  de Pâques ainsi qu'aux grandes vacances qui commençaient alors après la distribution des prix vers le 14 juillet. Aux vacances de Pâques, nous nous arrêtions toujours en forêt pour cueillir des jonquilles afin de les offrir à nos mamans.

    Le vieux bus, après avoir franchi la grille et passé sur le pont qui surplombait la petite rivière oui ruisseau entourant le château, nous déposait devant celui-ci, nous montions les escaliers du perron en fer-à-cheval, pour arriver dans le hall d'entrée.

    Ce grand hall était tout de marbre rose. A gauche, une porte donnait sur la première des deux salles de classe, celle des grands tenue par monsieur FONTAINE, de là nous allions dans la deuxième, celle des petits dirigée par madame FONTAINE.

    Face à la porte d'entrée, une porte  donnait accès à une grande salle que l'on nommait, à cause de sa forme ronde, la retonde. Cette pièce servait entre-autre pour les fêtes, on y mettait notamment le sapin de Noël. Quels souvenirs ce grand sapin, cela  voulait dire pour nous le départ, le retour dans nos familles. Majestueux sapin, fraîchement coupé, décoré, avec, déposés à son pied, des cadeaux pour chaque enfant, oh pas de gros cadeaux, mais chacun recevait un sachet de bonbons des mandarines et un livre, que nous prenions vite avant de monter dans le bus qui nous ramènerait vers Paris. C'est pourquoi, Noël a toujours été synonyme de départ et   avait une odeur de sapin mélangé à celle des mandarines.

    "REVIVRE" A tous les anciens d'Avesnes-le-Sec

    la retonde

    Mais revenons dans la salle de marbre rose, sûrement du marbre de Rance. Sur la droite était la porte qui donnait sur une grande salle à manger, les cuisines et l’escalier allant vers les étages.

    Les étages, il y en avait deux. Au premier, au fond à gauche, étaient ; l'appartement de monsieur et madame FONTAINE ainsi que leurs enfants et l'infirmerie, sur le milieu une salle de jeux sur les murs de laquelle avaient été peints les personnages de Blanche-neige et les sept nains et des chambres. Au deuxième d'autres chambres et les douches.

    A l'arrière du château nous avions la cour de récréation,  plus loin, derrière la rivière une grande prairie et des vaches.

    C'est là que j'ai découvert la campagne et ses odeurs, le parfum des jacinthes au printemps, l'odeur de la terre. Un jour de printemps alors qu'il venait de pleuvoir, nous étions en classe, monsieur FONTAINE, nous demanda de poser nos crayons, et de sortir dans la cour, et là, je l'entends encore nous dire  : " vous les petits parisiens, respirez et sentez bon la terre". A l'automne, je me souviens que lorsque nous sortions nous promener, en longeant sur la droite le mur du parc du château, il y avait des frênes dont nous ramassions les fruits pour les mettre sur nos tartines ou les manger avec des pommes.

    Dans le parc du château, sous les arbres non loin de l'entrée, il y avait un plaque sur laquelle ils nous arrivaient d'aller nous recueillir et y déposer des fleurs. Sur cette plaque était gravé : " A nos chers papas morts pour la France". 

    "REVIVRE" A tous les anciens d'Avesnes-le-Sec

    enfants devant le perron

     

    "REVIVRE" A tous les anciens d'Avesnes-le-Sec

    02 mai 1954

    Les anciens du villages se souviennent peut-être encore de ces enfants qui allaient se promener en groupe dans les rues du village, le jeudi ou le dimanche. Nos promenades nous emmenaient souvent jusqu'à la ferme de monsieur LANTHIER, vers le vieux moulin, au bois de Bouchain, à Iwuy sur les bords de l'Escaut, Hapres ou encore Noyelles-sur-Selle.

    En faisant des recherches sur internet pour trouver un peu l'histoire de ce château, j'ai découvert que durant la Première Guerre mondiale, il avait été occupé de novembre 1917 à mars 1918 par le célèbre "Baron rouge" Manfred Von RICHTHOFEN.

    "REVIVRE" A tous les anciens d'Avesnes-le-Sec

     

    Cet homme fut surnommé l'as des as de l'aviation allemande, et le diable rouge par les anglais en référence à la couleur de son avion. Il cumulait déjà quatre-vingts victoires quand en avril 1918 il prend part à une nouvelle mission qui pour lui sera la dernière. Son avion fut abattu à Vaux-sur-Somme. Les alliés rendirent hommage à son courage en l'enterrant avec les honneurs militaires.

     

    "REVIVRE" A tous les anciens d'Avesnes-le-Sec

     

    Merci à tous ceux qui nous ont permis de "REVIVRE"


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  • Je voudrais ici rendre un hommage à un grand Monsieur, grand par la taille, mais aussi et surtout par le cœur

    Jean-Pierre LEVY

    Jean-Pierre LEVY, qui, sans l'initiative prise avec un certain nombre d'anciens compagnons, n'aurait pas permis à plusieurs milliers d'enfants de REVIVRE, ou tout simplement vivre après la guerre de 1939-1945.

    Né en Alsace, à Strasbourg, il est devenu très tôt orphelin. Quand survient la guerre de 1939-1945, il entre très vite en Résistance. Au côté de Jean MOULIN, il fonde le Comité National de la Résistance. Ce qu'il a fait durant sa vie, vous pouvez le lire sur différents sites internet. Ou encore les Mémoires d'un franc-tireur dont vous pouvez en lire un aperçu ici.

    Mais très peu vous dirons combien il a œuvré, avec quelques autres, dès le printemps de 1945 à essayer de résoudre un problème qui leur paraissait capital, parce que correspondant à l'un des plus élémentaires devoirs de la solidarité humaine. Des milliers d'enfants de leurs camarades fusillés ou morts en déportation se trouvaient à l'abandon, l'état ne pouvant leur apporter qu'une aide matérielle de complément et proclamait lui-même la nécessité de groupements capables de jouer auprès d'eux le rôle irremplaçable de la famille.

    Et, c'est la volonté de tenir la promesse faite à ceux qui étaient tombés auprès d'eux dans le combat quotidien, qui les décidèrent à s'engager.

    Sans argent, sans locaux, ils créèrent une association pour une durée de cinquante ans et lui donnèrent pour nom "REVIVRE". 

    "Ces enfants ne doivent pas être des orphelins tristes, en uniforme. Ils connaîtront, grâce à vous, la chaleur d'un foyer" C'est en ces termes, que Claude BOURDET  s'adressait dans son discours d'accueil, en 1947,  à l'occasion du Bal des Petits Lits blancs donné le jeudi 26 juin au Théâtre National de l'Opéra à Paris "S'il est possible, ce soir, de voir renaître une des plus belles fêtes de l'avant-guerre dans un Paris ressuscité, c'est parce que des millions d'hommes ont donné leur vie pour la liberté. Parmi ceux-là, que nous aimons tous et que nous n'oublierons jamais, les plus chers à notre cœur sont ces combattants obscurs et patients qui ont tenu quatre ans et davantage contre l'ennemi, au nom des Français et pour la France.

    L'immense dette que notre pays et le monde entier ont contractée envers ces combattants, nous sommes quelques-uns qui cherchons depuis trois ans à l'acquitter envers leurs enfants.

    Les esprits chagrins, qui confondent la pureté avec l'ennui et les rancœurs petite-bourgeoises avec le sentiment de l'honneur, trouveront sans doute qu'il est déplacé d'associer les enfants morts aux joies des vivants. Laissez un compagnon des disparus vous dire qu'ils sont morts pour la France soit libre, et non pas pour qu'elle soit terne et triste.

    Votre devoir, votre seul devoir envers les disparus, c'est d'être dignes d'eux et d'aider leurs enfants à vivre."

     

    Les problèmes devant lesquels l'association se trouvait étaient de deux sortes. Des enfants de deux à vingt ans, soient, complètement orphelins et n'ayant aucune famille pour les prendre en charge, d'autres plus nombreux, qui par la suite du décès du père ou de la mère, voyaient leur situation entièrement bouleversée. De nombreuses œuvres ou services sociaux, les grandes œuvres de la Résistance comme le C.O.S.O.R. ou les fédérations avaient déjà entrepris d'aider les familles des résistants.

    La tâche à accomplir était assez vaste pour que de nouveaux efforts soient possibles sans double emploi.

    Début 1947, après d'immenses difficultés, contrairement à beaucoup de groupements nés dans les jours de la Libération, REVIVRE existait encore, et 1.332 enfants étaient suivis.

    Les premiers centre de "REVIVRE" à accueillir des enfants furent : Les Vaux-de-Cernay, Bondy et Ville-d'Avray en 1945-1946. Ils furent très vite remplacés par l'école de plein-air dans le château d'Avesnes-le-Sec (59) et la maison d'Orgerus en Seine-et-Oise. Et pour les vacances, le château de Boissise-la-Bertrand en Seine-et-Marne. Une autre colonie à Notre-Dame-de-Monts en Vendée et une autre au Puy-du-Fresnay-d 'Oisans en Isère.

    En 1946, des enfants partirent en vacances dans des familles d'accueil, en Angleterre, en Belgique, au Tyrol, en Forêt-Noire et dans différentes régions de France.

    Merci à Claude BOURDET, président, Micheline CLEMENT et Jean-Pierre LEVY, vice-présidents, Pierre KAHN-FARELLE, trésorier, Emile DOUCET, secrétaire, Yvette BERNARD-FARNOUX, Evelyne GARNIER, Hélène GAUSSOT, Geneviève de GAULLE-ANTHONIOZ, Annie HERVÉ, Madeleine LEO-LAGRANGE Simone MARTIN-CHAUFFIER, Claude AVELINE, Jeanne THIERRY, Marcel DEGLIAME, Robert LACOSTE, André MALRAUX, Edmond MICHELET, Pierre MINE, Etienne MOULIN, Révérend-Père RIQUET, , René TROADEC et Georges VILLIERS, membres du comité directeur en 1950, sans oublier Marie-Claude VAILLANT-COUTURIER, Eugène CLAUDIUS-PETIT, et notre admirable Simone BRANJONNEAU qui fut pour tous, une assistante sociale, une mère et une amie.

     


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